samedi 15 novembre 2014

Heu... Je reviens


De retour... Je n'aurais même pas l'occasion de  ramener le virus ébola, ni même de me payer ne serait-ce qu'une minuscule intoxication alimentaire. Je vous imagine déçu, ça manque de panache. Mais l'opportunité qui s'offre à moi était bien trop alléchante pour que je ne la saisisse. Je reviens pour repartir, en décembre, travailler en Andalousie. 

En ce qui concerne ce périple, je reste frustré de ne pas avoir entamé les choses "sérieuses", le stop jusqu'au Sénégal, la découverte de nouveaux pays. Mais ces deux mois passés sur mon vélo m'ont fais du bien. J'en redemande... mais dans trois ans minimum.

A bientôt

Et surtout morses et horreur!



Ce qui devrait devenir selon toute vraisemblance ma future vue de la maison en Andalousie. Je crois que j'ai été suffisamment accueilli depuis quelques années. Je deviens hôte! à bon entendeur...

Le Cap Spartel à l'ouest de Tanger, au loin on voit Cadix. Là où le p'tit frangin devrait arriver dans quelques mois après avoir traversé la France puis l'Espagne... en monocycle! http://cruditeproject.canalblog.com/

Ce jour là j'ai croisé deux scorpions, le premier assez débonnaire (le voici). Le second légèrement plus inquiétant car squattant dans l'auvent de ma tente.

Petit village dans le Rif Marocain

Le mariage du prince qui a donné lieu pendant quelques jours à un gigantesque concours de lèche dans les médias marocains. 

Le point final de cette parenthèse, Rabat (tu par les vents et la houle... un dernier pouf pouf)




mercredi 12 novembre 2014

Pédaler en rond



Je ne peux m'empêcher en arrivant à Tanger de me remémorer mon arrivée à Melilla il y a deux ans http://www.geocyclab.fr/carnet-de-bord/jour-75-melilla/. Pour la première fois je mettais les roues sur le continent africain, dans une enclave espagnole. Cette contiguïté incongrue des deux continents avait sans doute accentuer ma sensation de passer un sas brutal, représentatif des rêves altérés du sud se heurtant à la riche citadelle européenne. J'en garde l'image (entre autre) de ce mur de fer que nous avions longé sur des kilomètres pour enfin trouver la porte de sortie. Une sorte de baffe géopolitique, les triples rangée de grillages, puis cette impression d'être happé par le flux humain dans cet étroit corridor économique. Luxuriance en carton pâte d'un coté, effervescence de la débrouille de l'autre.

Cette fois-ci le court trajet en bateau de Tarifa fais son office. Sur le quai c'est déjà le Maroc, calme... Les formalités de douanes et de polices sont quasi inexistante. J'en suis tellement surpris que je vais jusqu'à faire demi tour et demander à un douanier si je peux vraiment passer!

Par contre j'ai toute la journée de quoi m'amuser avec des différences avec l'Espagne, parfois anodines, mais qui capte forcément l'attention.  Par exemple, lorsque je peux m'accrocher à un camion ou un tracteur pour passer des bosses, j'ai du mal à résister à l'appel de ce remonte pente improvisé. Je ne l'ai tenté qu'une fois au Portugal. Ce qui m'a valu klaxons et invectives des voitures suiveuses. A Tanger, personne ne moufte, et en prime le conducteur de l'engin engage une conversation par rétroviseur interposé et gratifie ma téméraire initiative d'un pouce levé et de sourires.
Je m'attarde aussi sur l'agencement des villes. En Europe, l'hypercentre est généralement l'apanage de la classe aisée. Au Maroc c'est l 'inverse, le centre est étroit,chahuté, populaire. Plus l'on s'éloigne plus les maisons se font cossues,les propriétés verdoyantes et vastes. Tanger étant situé dans une baie, l'élévation sociale de ses habitants est urbanistiquement visible,et criante. C'est d'ailleurs une des caractéristiques du Maroc, la visibilité extrême des différences de revenus. Traduite en ces termes par un vieux monsieur rencontrés au bord de la route "ici les dirigeants mangent beaucoup..."

Une autre anecdote, qui résume certaines absurdités de la société marocaine. Une route de montagne serpentant dans le Rif, constellée de nid de poule, il me faut parfois débusquer le bitume pour m'y frayer un chemin. Je me la cogne  (le verbe prend ici tout son sens au propre comme au figuré) sur 30 km. Quand au milieu des lacets m'apparait un panneau, attention louable quoique risible, le pictogramme met en garde l'usager contre la présence de... dos d'âne!

Depuis mon arrivée,j'en bave. J'en dégouline plutôt! Les cieux sont contre moi, nuits et jours se mèlent en d'épaisses et spongieuses précipitations. Heureusement, les sourires et encouragements parsèment ma route. Un tracé d'ailleurs fort sinueux, entre Tanger et Rabat, dans l'attente d'une réponse qui déterminera la suite du voyage. Je pédale en rond (dans l'eau!).




jeudi 6 novembre 2014

Quelques photos de l'Espugal


Hola,

Je viens de passer le détroit de Gibraltar. Me voila au Maroc... Depuis deux heures! Drôle de choix que celui de se terrer dans un Cyber. Mais je me suis dis que mon blog n'était pas franchement fournis depuis mon départ. Alors je commence par ça, les Cyber n'existant pas en Europe, il est bien plus facile ici de trouver un ordi et un clavier. C'est également pour annoncer que ma tablette m'a lâché. Je suis un peu en rogne. En même temps cela va me permettre de rentrer dans une nouvelle/ancienne ère, celle ou les moyens de communication ne sont ni simples ni instantanés.

Je vais continuer à me dédouaner de mon absence de nouvelles, mais croyez le si vous le voulez, j'avais écrit quelques articles sur ma tablette, durant ce mois et demi de voyage.  Je n'ai pas réussi à les poster (pas pris le temps surtout). La tablette étant foutu, le monde que dis-je l'univers aura perdu quelques magnifiques envolées lyriques. Je sais c'est dur... Je ne vous parlerais donc pas des rencontres du troisièmes type qu'il m'a été donné de faire, le char d'assaut russe, le tortionnaire de la guerre d'Algérie, les marcheuses de la cuisine, le faiseur de non aventure, le marathonien sans chaussures...

Vous échapperez également à la description méthodique de mes rituels quotidiens. Et il y en a des refuges de la monotonie dans ce type de voyage.  Qui c'est les veinards?

Mais je vais essayer de me rattraper dans les jours qui viennent. Je vais avoir du temps car je compte arriver à Rabat dans une dizaine de jours (c'est à 300 km), pour un tournant de ce voyage, soit je rentre en Bretagne pour repartir en Espagne, soit je fais du stop jusqu'à Dakar. Je sais, la première option parait étrange mais je me suis laissé guidé par ce qu'un hôte espagnol a tenté de m'enseigner durant de longues heures... la philosophie de la coïncidence.

Je vais donc m'en remettre aux photos (celles stockées sur une clé USB et non sur la tablette...). Elle ne sont évidemment pas dans un quelconque ordre chronologique:
Le pictogramme de piste cyclable le plus improbable qu'il m'ait été donné de voir. 

Lac muy chulo en Andalousie, c'était fin octobre, la nuit va bientôt m'envelopper. Comme vous pouvez le constater, j'ai chaud!



Peut-être bientôt pas si faux. 

Mon plus haut col, j'en suis fier. Tellement fier que je l'ai grimpé deux fois...


La veille de mon passage au Portugal, la rivière marquant la séparation entre les deux pays. 

Décidément je dois avoir un truc avec les frontières... Le pont qui enjambe la rivière ci-dessus. 

Surprenante découverte du Camino portugais. Dès lors qu'une ville ne possède pas d'auberge, il suffit d'aller chez les pompiers pour obtenir l'asile pour la nuit! 

United colors of Portugal

Ça sent quand même la contradiction, banque, esprit sain. Je reste dubitatif!

Nazaré

A défaut de poissons

Sans doute le squat le plus classieux de ma descente. 

Côte portuguaise

idem

Il y en d'autres.. C'était juste pour vous prouver que vous me suiviez bien comme un virus. Car si la honte est contagieuse, je contamine à chaque fois que tends cette photo devant moi. 

Un autre squat au Portugal.

jeudi 25 septembre 2014

Partir c'est aussi morfler un peu... au début


C'est reparti pour un tour, de pédale car il ne s'agira pas circonvolution, plutôt une ligne verticale à tracer vers le sud. l'Afrique du sud en point de mire, mais non comme objectif ultime. je pars donc sans visée précise , hormis celle de retrouver l'Afrique équatoriale que je n'avais fait qu'effleurer. Ensuite, ben ensuite je verrais, j'en suis encore loin mais déjà pressé d'y être. L'empressement est une de mes pathologies que le rythme du voyage va s'en doute atténuer... Partis d'Irun il y 8 jours, je serais à Santiago demain avant de poursuivre vers le Portugal.

Pour l'instant je vais trop vite sur le chemin de saint Jacques ( d'Irun à santiago), je ne fais que croiser des cohortes de pèlerins, tous les 20 km environs. Mon moyen de locomotion m'empêche de me fondre dans un groupe. je n'aurais donc pas le droit à mes séances d'introspection collectives. En même temps vu la densité d'allemand et ma maîtrise impeccable de leur langue je n'aurais que peu profité des expériences de chacun. J'ai quand même rencontré un allemand qui s'est excusé d'en être un, sur le mode "et oui je ne déroge pas à la règle de la sureprésentation".

J'ai pas mal misé sur mon matériel ancien, que je n'ai pas vérifié bien sûr! Petit tour d'horizon (crépusculaire) de mes ratés: un imperméable perméable qui fais de moi une serpillère à la première goutte de pluie, une sacoche trouée ce qui m'en bouche un coin  ( pouf pouf...), des chaussures trop courtes d'une pointure, la sacoche de guidon qui s'arrache de l'intérieur à s'en fendre l'âme Arthur (re pouf pouf). Un dérailleur qui grince, crisse, râle, suffoque, suinte, frotte... De manière forte inquiétante. Et enfin une tente dont le sol moucheté de trous, façon ciel étoilé au milieu de l'Atlantique,  me permettra d'accueillir pendant mon sommeil une quantité non négligeable d'insectes dépourvus de domicile.

j'avais aussi misé sur mon physique étincelant... raté. d'abord parce que les vaccins en rafales que je m'étais injecté ont des effets secondaires, nausées et maux de tête. Du coup, mes trois premiers jours ont été placés sous le signe de l'ascèse, économique peut-être mais peu adapté à mes efforts quotidiens. Ensuite car que la saison de football clairsemée au FC Mellac n'a pas constitué un travail de fond ( de bas fonds peut-être). Qu'enfin l'été festif a fait de moi une usine à toxine. Qu'on se rassure, mes 80 km quotidiens me retape, j'ai retrouvé l'appétit à raison de 5 pauses restauration par jour, mes cuisses ont triplé de volume (peut-être j'exagère un tout petit peu) et je dors 12h par nuit.

Au rayon rencontre amusante, celle de ce vieux monsieur à Gijón à qui je demande la route pour Avilès. Il commence par poser un pied sur le rambarde devant moi, m'interdisant toute manœuvre de fuite, me regarde droit dans les yeux et me dit " Commençons par Gijón", avant de se lancer dans une présentation historique de la ville (xixa  à l'origine car le port est une création romaine, de toute façon quand c'est pas Vauban c'est romain). Il veille à ce que je comprenne chacune de ses paroles, me répétant les infos si il le faut. Il me ramène à ses combats pour la liberté sous Franco, à son action syndicale. Puis frappé par la fatalité, il conclue par un "mais pourquoi faire? Pour se demander comment manger maintenant?". La ville se meurt selon lui, l'industrie c'est éteinte. Il l'illustre par une statistique dramatiquement cynique. Il y a maintenant plus de chiens que d'enfants à Gijón...
L'exposé terminé, il enlève son pieds de la rambarde, me libère le passage et déclare dans un sourire "en fait Avilés c'est tout droit, t'es sur la route". Muchas gracias señor!

Et ces danois venant de Londres, à ma question (stupide sur le camino), vous allez vers Santiago? L'homme me répond sans rire "non vers Barcelone, nous sommes déjà sauvé". Donc si je réfléchis bien , ce sera ma troisième arrivée à Santiago, mon âme est donc à présent aussi pure que l'eau d'un glacier. Je vais donc enfin pouvoir verser dans la débauche, ce que mon éducation judéo-chrétienne m'interdisait jusqu'à présent...

Ah si pour finir, petit exercice de diction appris d'un vieux patron de bar en Asturies, parlant français comme un basque espagnole, " c'est honteux mais tentant de tâter les tétons de tata quand tonton n'est pas la". Je l'ai fais répéter 10 fois... J'adore.

Pour le moment la route se fait belle, parsemée de quelques  sympathiques rencontres, de paysages de toute beauté, je roule, roule et roule encore. Et ça me suffit.

Hasta luego et bien sûr, force et honneur!

PS: pas de photos cette fois ci, je n'arrive pas à faire la manip sur ma tablette et pas très sur de vouloir passer des heures à me pencher sur le problème. J'en mettrais au prochain cyber que je croise.

vendredi 29 mars 2013

Nanga deef,

Suite et fin donc de ma chevauchée, je suis en Guyane, et oui! Ceci sera mon dernier article avant peut-être de reprendre la route et la plume sur les chemins d’Amérique du Sud. Pour le moment, la mission est très simple, renflouer mon compte en banque!

Ma traversée de l'Atlantique s'est effectuée en avion, à mon grand regret. Mais je ne me sentais pas d'attendre à Dakar pendant des semaines encore. Sachant que cette ville n'est pas des plus agréables à vivre, à moins peut-être de s'être greffer un masque à gaz et condamner ses conduits auditifs... J'ai donc fais le choix au bout de deux semaine d'une attente vaine et oisive de prendre un billet d'avion et de filer avant mon départ en Casamance (c'est le sud du Sénégal séparée du reste du pays par la Gambie).
Pour la petite histoire, j'ai rencontré là-bas, peu de temps avant mon départ, un couple et leur deux enfants qui s’apprêtaient à partir avec leur voilier en Guyane. Ils pouvaientt m'amener qui plus est! Oui mais.... je n'avais évidemment pas pris d'assurance annulation sur mon vol, arghhhhhhhh!

Quitter Dakar a été pour moi un grand soulagement, marre de la ville, de l'attente, du sur place.

Une correspondance en bateau existe entre Dakar et Ziguinchor, la voyage de 16H se ponctue d'une remontée splendide d'un fleuve bordée d'ïle et de mangroves et du salut spectaculaire des dauphins, pas dégueu... Sur le bateau je retrouve une cycliste, déjà entraperçue au cercle de voile de Dakar. Elle vient de France, et à peu de chose près, à réaliser le même parcours que moi. Je passerai  le reste de mon séjour avec elle, sa soeur et son ami qui nous rejoigne après avoir rallier la Casamance en vélo par la Gambie (ils viennent également de France en vélo en ayant effectué un très léger détour par la Turquie!).
Autant dire que pédaler en groupe me fait extrêmement plaisir. Et la région s'avère paradisiaque. La nature est généreuse, les gens sont d'ailleurs autosuffisant au niveau alimentaire et ce dans un rayons d'un kilomètre autour des maisons (pourtant les ONG s'y pressent, le lieu étant suffisamment glamour pour y pratiquer confortablement le don de soi...). Tout la bas pousse à profusion, y compris le vin (le bounouk) qui est récolté sur les palmiers! Oui, oui, récolté à 10 mètres de hauteur et immédiatement prèt à être dégusté...

L'ambiance tranche avec le reste du Sénégal, peu de sollicitations, une hospitalité à la hauteur de la Teranga Sénégalaise. Et comble de la joie, allégresse absolue, la région est remplie de rivières et des poissons qui vont avec! Olivier qui nous accueille pendant 5 jours est férue de pêche et m'initie à l'art de ne pas rentrer bredouille. Bredouille dont je m'étais jusqu'alors fait une spécialité...
chez Olivier, côté mangrove

Olivier et Guillaume après la longue danse des funérailles

Funérailles du chef de village d'Edyoungou, très très impressionnant, d'autant plus lorsqu'on y participe.
L'ensemble ou presque des danseurs se préparent en picolant consciencieusement du vin de palme depuis des heures... 2H de danse et une certaine célébrité acquise en Casamance, car les gens affluent de toutes la région pour la cérémonie.

Pirogue, mangrove, pêche, amis, on frôle la perfection

Chez Olivier côté cour


Notez la boue dont je suis enduit, qui participe à ma sensation de bien-être...

retour/course contre la montre au coucher du soleil

campement carte postale

no comment
Mon vélo à suivi outre atlantique, promesse d'une nouvelle balade en Amérique du Sud...
A la prochaine

 

lundi 25 février 2013

Nanga deef





Quelques jours se sont écoulés depuis mes dernières nouvelles... Le temps d'un bond jusqu'au Sénégal!
Dakhla que j'ai quitté avec difficulté, rencontre d’Ahmed oblige. Sarahoui, il est un derniers à vivre sous tente. J'y resterai trois jours, rejoins par David qui voyage depuis quelques mois au Maroc. Le lieu invite à la contemplation et au repos. Toute la philosophie de vie d’Ahmed, ancien cuisinier sur les navire usine qui s'est retiré dans sa crique. Nous enchainons les parties d'échecs, entre chicha, thé (une liqueur devrais-je dire tellement son breuvage est sucré), bonne bouffe et discussions illuminées par la syntaxe et la prononciation improbable d’Ahmed.
Je repars vers le désert ensuite pour les 300 km qui me sépare de la frontière mauritanienne. La chaleur monte autant que le taux d'humidité diminue, c'est la gorge sèche que je termine le Maroc. D'autant plus qu'il me faut me taper 200 km sans ravitaillement possible. Et ça je le savais pas! On m'avait parlé de stations essences mais elles sont toutes fermées. C'est un détour par un village de pêcheur qui me permet de continuer en vélo. Prénommé Chika (par ironie, c'est pas possible, que des mecs!), les pêcheurs l'appellent Guantánamo. Un entrelacs de petites cahutes de toiles, cartons, bois et parpaings dans laquelle ils passent 8 mois de suite. J'y resterai une aprèm avec quelques jeunes qui m'y racontent leur vie, espoir et frustration.

Arrivé à la frontière je me décide à passer le no man's land en vélo. Une zone de quelques kilomètres de large, minée sensément que la Mauritanie et le Maroc ont érigé pour empêcher le passage des touaregs. Une zone de non droit, sans goudron où le trafic de voiture fleurie. Ce qui donne à ce passage un petit côté Beyrouth, voitures calcinées, désossées sont légions. 
La douane Mauritanienne est pas spécialement consistante en terme d'infrastructure... Mais s'avère être une imposante machine à bakchich. Les douaniers encaissent des billets en toute indifférence, le pouvoir qu'ils ont c'est de te garder le temps qu'ils veulent. Ils en profitent. Échaudé par mes derniers km de désert je décide de faire du stop jusqu'à Nouakchott. Je trouve en moins d'une minute. Mais au royaume de l'arbitraire le départ est une échéance relative... J'attendrai plus de 30 heures qu'il daignent nous laisser passer. Le conducteur, Oland, un allemand, reste imperturbable sans doute vacciné par 40 ans à descendre des camions en Afrique. Cette fois ci il descend un vieux bus, dans lequel un photographe lituanien à déjà pris place. L'attente est longue mais partagé avec une centaine de camions. Partie d'échecs avec le lituanien et déambulation dans cette zone, aux allures de décharges balayées par des vents poussiéreux, pour passer le temps et apprendre les bases du bizness de voitures vers l'Afrique!
Le départ enfin, sous escorte s'il vous plait, payante et imposée ça va de soi! Ils aura fallu faire croire au chefs des douaniers  (un sinistre connard en costard, qui se la joue parrain) que Oland a des problèmes cardiaques et qu'il n'a bientôt plus de traitement.
 
Les points de contrôles sont nombreux, des flics la kalachnikov parfois en évidence, nous vérifient un nombre de fois incalculables les passeports. Des questions parfois, profession? Oland répond mécanicien gynécologique ce que le flic retranscrit imperturbable sur son carnet. C’est gras et con comme humour, j'adore!

Nouakchott, 3H du mat, j'arrive pas à me motiver pour sortir et me trouver un coin ou dormir. Je reste dans les bus. Je traverse le pays en une journée pour arrivée à Rosso. Le paysage a complètement changé, les arbres ont pris au fur et à mesure possession des dunes, la couleur du sable tend vers le rouge. 

Rosso, premier point d'exclamation dans le regard, les femmes ont repris possession de l'espace public, le voile tombe, les voix féminines retentissent.
Les gens m'enjoignent de prendre le bac pour rallier le Sénégal. Je me méfie des commentaires sur l'état et la dangerosité de la piste jusqu'à Diama, le commerce ici c'est la frontière, tout est bon pour t'y faire passer et tranquillement racketter. Têtu maintenant, je prend la piste, évidemment tout était faux... le paysage traversé est magique, la piste praticable, la faune et la flore abondante de diversité (mangrove, lacs, phacochères, pélicans, échassiers en pagaille).

Frontière Mauritanie/Sénégal, je commence à apprécier le jeu. Le but de l'interlocuteur, te soutirer des tunes en invoquant une pseudo raison administrative, mes parades, le vélo (même si un flic n'hésite pas à me demander de l'argent pour l'enregistrement de mon véhicule!) et la patience... la technique est payante, économique devrais je dire.

J'arrive à Saint Louis le lendemain. Aux premiers jours  intenses de découvertes, de rencontres succèdent une phase de stagnation totale. Je découvre les joies de la tourista...




Je serais obligé de réveiller le réceptionniste avec ma canne à pêche... A peine surpris il me renseigne comme si de rien n'était. Un flegme que je qualifierai de "so british"!

A peine remis de mes tracasseries gastro-fécales je repars vers Dakar. Le premier jours est dur. L'effet combiné de la maladie et du traitement antipalu me provoque des vertiges. Mais la grosse suée est salutaire, j'enfile plus de 100km le lendemain. 

Petite parenthèse exaspérée:  "tubab cadeau"

C'est l'expression que j'entends ici le plus. Irritant, difficilement dépassable, transgénérationnel bien que les mômes soient les plus enclins à le sortir, sa périodicité m'épuise. Je me sens nullement supérieur quand je l'entends, je le dis car je soupçonne beaucoup d'occidentaux de l'être. Je tente parfois la discussion, pour en comprendre les origines, l'humour pour ne pas m'énerver, l'explication pour me faire croire au vertu de la parole. Car c'est pas évident de se voir réduit à une couleur, à un portefeuille, de voir entériner une domination, celle de la charité occidentale.
Je m'interroge surtout. Parce que l'expression et les symboles qu'elle véhicule ont des fondements. J'en discerne plusieurs.
Une éducation du quotidien d'abord, des occidentaux donnent effectivement des stylos, bonbons, piécettes. Un jeu pour les enfants de les récupérer, plus qu'une nécessité, mais qui fige des positions, je mendie donc je m'écrase toi grand seigneur tu distribues...
Le rôle des ONG et autres organes étatiques d'aide au développement... Une belle farce à mon sens ou l'art de rien remettre en cause en se donnant bonne conscience. Je ne vilipende pas les personnes qui y participe (quoique certains...), c'est autre chose qui m'agace. Je déverse c'est partis... les concours publicitaires des ONG, une action, un panneau, j'en dénombre 5 dans un village. Désintéressées les actions, mais pourquoi alors ce souci constant de mettre en avant son action, une façon de marteler "rappelez vous comme nous sommes bons".
Les véhicules des intervenants de l'aide au développement, c'est un peu jamais sans mon 4/4 flambant neuf. Dans un pays ou le déplacement auto est un luxe, nul indécence à exhiber des véhicules hors de prix. Le salaire que je sais très élevé des travailleurs de l'humanitaire ( un salaire expatrié c'est confortable), les sièges toujours bien en vue des organisations. Alors moi la question que je me pose c'est quelle part du budget est directement attribuée à l'action? C'est pourtant ce que retienne les gens qui reçoivent les subsides, des occidentaux arborant tous les signes de richesses venu leur apporter leur lumières et des piécettes...
J'arrête ici, mais il y aurait tellement à dire sur le sujet.

J'ai donc repris la route vers Dakar, sillonnant entre baobab, manguiers, fromagers et tant d'autres. Je passe mon temps à regarder les arbres pour y entrevoir leurs habitants, du pur bonheur ces quelques kilomètres.
Dakar c'est bruyant, pollué, encombré,mes premières impressions sont mitigées. A cela s'ajoute la sensation de terminer mon parcours africain. Parce que le défi du moment c'est de trouver un voilier pour traverser l'atlantique. Je me suis donc installé au cercle de voile de Dakar dans l'attente d'un bateau et d'un skipper qui accepterai de me prendre, pas impossible mais pas évident...

Quelques photos d'une qualité incertaine. La cause, le vol de mon appareil photo... Un don plus qu'un vol tellement j'ai été étourdi... Je dois donc utiliser ma tablette et n'ose pas la sortir fréquemment, la gène d'exposer le joujoux dans un pays ou certains galère pour bouffer. 
tente d'Ahmed

Ahmed et David

Les pêcheurs de Guantánamo!

Tente d'Ahmed, la vue sur mer qui demande un petit effort d'imagination...

Dans l'attente je me balade, glande beaucoup... Je ne sais pas attendre, je  ne suis pas doué pour ce genre d'exercice. Je me laisse encore deux semaines pour trouver un bateau avant d'envisager autrement les choses, soit je reprends le vélo et m'enfonce en Afrique noire, soit je prends un avion pour me téléporter en Guyane, soit je fais les deux....
Ba bennen

dimanche 27 janvier 2013

autant en emporte le vent





Il pleut. Abrité sous ma tente j'entends les gouttes cingler la toile. Surprenant dans cette nature sèche et inhospitalière. Fatigué je passe une soirée que j'affectionne à présent, des petits rituels ont envahie mes pauses nocturne, lecture, écriture et écoute attentive des émissions de <là bas s'y suis>. Je me sens bien, à l'abri dans ma fragile et précaire habitation (malgré ce que me disent toutes les personnes, attentionnées, qui m'enjoignent de dormir près des habitations, des postes de police). Je préfère mon isolement, les dunes, le son rare et lointain des voitures. Je ne pensais pas un jour me satisfaire à ce point de cette solitude. Le décor est somme toute monotone à présent. Je descends une ligne de bitume, les falaises à ma droite, les étendues arides à ma gauche. J'en vient à attendre avec impatience les dénivelés, les virages. Mais ils sont rares, une platitude désespérante pour citer Tony. Je ne suis pas sûre d'être taillé pour autant de monotonie, à présent je ne rencontrerais des bleds que tout les 100 km, hum...
Je ne cherche pas pour l'instant de convoyeur, je me dis que ça viendra tout seul...
 
Je ne suis pourtant pas en manque de contact humain, espacés peut-être, mais à chaque pause son ambiance, exemple sur une journée. 
Brève discussion dès le matin, quelques marocains s'amuse de mon voyage et me demandent pourquoi, heu... c'est que... enfin bon... ben... je sais pas trop en fait mais j'en profite! A peine 2 km effectués, un camping car s'arrête devant moi, le conducteur me félicite. La discussion s'oriente vers l'histoire du Maroc, intéressant, mais je sens le prosélyte de droite. Bingo, il finit par me conseiller la lecture du figaro, les autres journaux, des suppôt éhontés de la gauche bien pensante. Ah bon! À ce petit jeu je lui propose la lecture du monde diplomatique, grand sourire. Ben ouais on sera pas d'accord, jamais je crois!
Arrivé près de l'embouchure d'un oued je me mèle aux campings-cars stationnés sur les falaises. Je me fais un traditionnel sandwich. C'est la fête à coté, je vais voir, en deux secondes j'ai un verre de rouge dans les mains et une assiette de couscous. Convivial c'est rien de le dire, tous retraités et rencontrés il y a peu, ils me prennent en main. Je ne repartirai pas tant que je n'ai pas pris quelques kilos. Bien le bonjour à vous, continuez à profiter ainsi.
Je repars un peu dopé (pinard/calva), je chante (mais alors faux!) et m'arrache jusqu'à la ville de Sidi Achkennir, à peine ralenti par un flic qui me demande de respecter les limitations de vitesse (véridicte, il se foutait gentillement de ma gueule, d'autant que j'exhalais quelques vapeurs d'alcool).
Dernière rencontre de la journée, des ouvriers sur le bord de la route me font signe de les rejoindre. Une dizaine, ils attendent la voiture qui les raménera à la ville. Ils me font asseoire, m'apportent thé et fruits. Mouloud, né en France (refoulé ensuite et qui à tenté déja trois fois le passage en zodiac, il recommencera jusqu'au bout...) traduit pour les autres qui posent questions sur questions. Vient celle fatidique, t'es chrétien? Non juste sûr de rien, bref walou! Incompréhension dans les regards, les yeux s'ouvrent en grand c'est pas mais pas du tout envisageable! Le débat s'engage, passionnant, Mouloud continue à traduire nos débits mitraillettes et nos visions ēloignées. L'un d'eux ,le barbu comme il l'appelle amicalement, ne lâche rien, mais écoute aussi. Je reste une brebis égarée je le sais, on est loin l'un de l'autre, mais naivement peut-être, je discerne le plaisir que l'on a à se parler.

J'aurais donc moi aussi, au moins une fois dans ma vie, ma traversé du désert! Bien encadré par la police et la gedarmerie, je suis controlé tout les 100km, au barage qui jalonnent l'unique route. J'oscille entre deux sentiments vis ã vis de ces controles. Le premier, l'exaspération devant cette débauche de surveillance policière, l'impression d'être en primaire avec les mêmes recommendations répétées cent fois. Du coup le môme je le fais un peu en changeant mais réponses, en ne dormant pas ou il le souhaite (dans ce cas ils lancent les recherches dans la nuit!).
Et le deuxième sentiment, ben finalement c'est l'attente de ces contrôles! Le désert c'est vaste, monotone et la présence humaine est limitée... Donc quand je viens de me fader de la borne a me vider la tête et m'hypertrophier le mollet (c'est mécanique, le fameux principe des vases communicants), je suis content de faire une pause avec les pandores. D'autant plus qu'ils sont souvent bavard et déconneurs, qu'ils m'offrent généralement le thé. L'un d'eux m'offre même ses lunettes de soleil! Et leur prévenance je dois bien l'avouer semble sincère, même si démesurée au regard de ce que je risque.
 
Je profites de vent porteur pour descendre rapidement vers le sud, mes étapes oscillent entre 150 et 200 km. Le vélo me menace de grève une première fois, la selle n'étant plus fixé. Je mate tant bien que mal la rébellion mais doit m'avouer vaincu lorsque mes rayons lâchent les uns aprës les autres. C'est pas plus mal ça me donne une très bonne excuse pour finir en stop. Enfin en stop.... C'est contràint et forcé par les flics, qui m'ont retrouvé, que les camioneurs m'amènent jusqu'à Dalkha. Mon vélo sera réparé avec une vitesse stupéfiante. Je passe 3H dans l'atelier à boire le thé, discuter avec les clients, les voisins. J'essaye de transposer la scène en France, et me dit que ces lieux de convivialités sont bien plus rares, ici beaucoup de commerce fonctionnent sur le mode salon de thé, qui me va très bien.
 
Depuis deux jours je suis donc à Dallkha, j'essaye timidement de prendre des poissons, c'est un échec. Il me reste une semaine avant de pouvoir passer en Mauritanie, je vais donc faire tranquillement les 400km qui me séparent de la frontière.
Tciao
Force et honneur!